Alexis Hanquinquant : un mental de Viking
Publié le 13 août 2020
-
Temps de lecture : 1 min
L'interview
Triple champion de France, d’Europe et du monde de paratriathlon, Alexis Hanquinquant fonçait sur les JO de Tokyo. Son rêve. C’était sans compter sur la crise sanitaire mondiale et l’annulation de toutes les compétitions. Ce coup dur n’a pas entamé la détermination de l’athlète... qui en a vu d’autres.
« Je n’ai pas vraiment de handicap, j’ai une différence. »
Comment avez-vous vécu la reprise des entraînements après deux mois de confinement ?
Dès le premier jour, je suis remonté sur la selle de mon vélo pour prendre l’air et revoir ces paysages normands qui m’avaient tant manqué, le Pays de Caux, ses petites routes de campagne. C’est mon terrain de jeux. J’ai pu reprendre également la natation dans le bassin d’entraînement de l’Ile Lacroix à Rouen. Les 7-8 semaines d’interruption m’ont beaucoup affecté d’un point de vue physiologique. Il m’a fallu trois semaines pour que ça revienne.
Au quotidien, vous vous entraînez avec trois sportifs sans handicap. Il n’y a pas de frontière entre triathlon et paratriathlon ?
Valentin, Antoine, Mickaël sont des triathlètes à part entière, comme moi. J’ai ce statut de sportif de haut niveau paratriathlon parce que j’ai une jambe en moins mais je me sens triathlète bien plus que paratriathlète. Je cours 5 km en 17mn, je nage 750 m en 10mn 30 et je roule à 40 km/h à vélo, soit 30 à 33mn pour 20 km suivant les parcours. Je ne rougirais pas d’aller m’entraîner avec Vincent Luis (NDLR champion du monde de triathlon, catégorie Elite). Au quotidien, je m’entraîne avec des gens valides, dans ma tête je suis valide, pour moi je n’ai pas vraiment de handicap, j’ai une différence.
Il vous arrive de croiser les champions du triathlon sur certaines épreuves ?
Chaque année, je dispute 5 à 6 épreuves à l’international. Parmi-elles, deux sont des rendez-vous communs avec les Elites. Il y a un monde de décalage avec eux, ils ont des primes de course, pas nous. Nous sommes les mêmes compétiteurs, mais en tant qu’hommes et femmes, nous ne sommes pas constitués des mêmes choses. Nous avons vécu des choses qu’ils n’ont pas vécues.
La crise sanitaire internationale est venue mettre un coup de frein à votre première participation aux Jeux Olympiques de Tokyo. Vous auriez dû les disputer cet été !
Fin 2019, j’avais la chance d’être champion du monde à Lausanne ce qui validait mon ticket pour les JO. J’avais programmé toute ma saison 2020 et coché dans le calendrier toutes les courses pour y arriver au top de la forme. Malheureusement, début mars, tout s’est un peu effondré ! C’est difficile de se préparer 4 ans pour atteindre cet objectif, je le touchais du bout des doigts. Il a fallu l’accepter et maintenant je suis reparti au front.
En 2013, trois ans après un accident professionnel qui vous a fait perdre l’usage d’une jambe, vous décidez de recourir à l’amputation et de vous lancer dans le triathlon. Comment êtes-vous parvenu à construire si vite ce nouveau projet ?
J’avais besoin de me dire que perdre une jambe n’était pas une fatalité, et même que cela allait me rendre plus fort. Il me fallait un objectif à la hauteur et, selon moi, le triathlon est l’un des sports les plus difficiles, avec trois disciplines qui demandent beaucoup d’investissement. C’est ce qui m’a donné envie d’avancer, tout de suite. Je sentais que ce sport était fait pour moi.
Comment a été perçu votre projet à l’époque ?
Les médecins m’ont tout de suite dit que j’avais un moignon un peu fragile et que ce n’était pas une bonne idée. Lorsque j’ai dit à ma femme, je veux faire les Jeux olympiques alors que je n’avais jamais essayé une prothèse de course à pied, elle m’a dit : "il faudrait peut-être redescendre sur terre". Je suis quelqu’un qui se donne beaucoup d’objectifs, c’est ce qui fait ma personnalité. J’ai un mental de Viking (sourire) !
Son entourage
Du haut de son 1,95 m, Alexis Hanquinquant ne passe pas inaperçu au bord des bassins de l’Ile Lacroix (Rouen). Licencié du Rouen Triathlon et membre de la Team Normandie, il a aussi ce qu’il appelle « sa différence », sa lame de carbone à la place du tibia droit. La marque d’un accident professionnel en 2010, à l’âge de 24 ans alors qu’il venait de remporter le titre de champion de France de full contact. A aujourd’hui 34 ans, il peut toujours compter sur un entourage solide : sa femme et ses deux enfants, ses parents, son prothésiste, ses deux coachs (Nicolas Pouleau à Rouen et Nicolas Becker, entraîneur national de l’Équipe de France de paratriathlon) et ses partenaires d’entraînement.
Quelle a été votre progression dans chacune des trois disciplines du triathlon ?
À mes débuts, c’est en course à pied que j’avais le plus gros impact, c’est d’ailleurs ce que je préférais. J’ai ensuite augmenté mes capacités en vélo. Le point noir, c’était la natation. Aujourd’hui, je suis arrivé à un équilibre quasi-parfait, Je suis vraiment complet dans les trois disciplines. Et au niveau international, c’est ce qui fait la différence.
À quoi ressemble une semaine de champion du monde de triathlon ?
En volume horaire, je tourne à peu près à 30 heures d’entraînement, ce qui représente 20 km de natation, 300 km de vélo et une quarantaine de km à pied. J’aime le triathlon car ce ne sont jamais les mêmes entraînements. Je suis salarié de Bouygues Bâtiment Grand Ouest, avec un emploi du temps très aménagé qui me permet de prioriser mes entraînements sportifs.
Le costume de favori n’est pas trop lourd à porter ?
Ça me plaît. Sur la ligne de départ, même si comme eux je suis un peu stressé, je ne laisse rien paraître, je veux leur faire comprendre que la victoire est pour moi ! Dès l’arrivée sur le parc à vélo, je suis un peu scruté. Je suis aussi l’un des premiers à avoir innové sur les points de transition, le premier à avoir pédalé avec la lame (NDLR : les autres athlètes ont une prothèse spécifique pour le vélo et une seconde pour la course à pied). On a conçu avec mon prothésiste une pédale avec une coque en carbone ce qui fait gagner quelques secondes. Les transitions sont très importantes dans le triathlon, encore plus dans un format sprint.
Avec une médaille d’or olympique, seriez-vous au bout de votre rêve ?
C’est la longévité qui me fait rêver ! Après Tokyo, je serai habité par les JO de Paris, c’est une telle chance de faire les Jeux en France. J’aurai 38 ans, je ne sais pas si je serai en fin de carrière mais j’aurai forcément envie d’être compétitif, de me qualifier et de faire le meilleur résultat possible.
Que représente pour vous la Team Normandie ?
Je suis très très chauvin. Je suis fier d’être Yvetotais, Normand, Français : les trois réunis me vont très bien. Lorsqu’on m’a proposé d’intégrer la Team Normandie, j’ai naturellement accepté. J’y ai croisé des sportifs qui ont les mêmes approches que moi, on a des horizons et des parcours différents mais il y a des complémentarités. Le mélange des expériences, c’est toujours bon à prendre.
Team Normandie
Team Normandie : nouvelle vague
À l’occasion de son 1er campus d’automne, le collectif d’athlètes normands de haut niveau entamera les 23 et 24 octobre prochains sa dernière ligne droite vers les JO de Tokyo (reportés à l’été 2021). L’occasion pour la Région d’intégrer, en partenariat avec les ligues des différentes disciplines, de nouveaux athlètes à suivre jusqu’aux JO de Paris 2024 ! Et de les accompagner au mieux dans leur quête de podiums en France et à l’international.
Tous Normands
Retrouvez cette interview dans le magazine Tous Normands #2, disponible dans plus de 120 communes et villes en Normandie : commerces de proximités, cafés, restaurants, supérettes, cinémas, bibliothèques, intercommunalités, mairies, espaces publics …
Tous Normands vous présente les différentes actions menées en Normandie dans tous les domaines dont la Région a la charge !
Dialogue citoyen
Reportages "Tous Normands"
-
JO Paris 2024 : qui sont les athlètes normands qualifiés ?
Publié le 19/07/2024 1 min
Une quinzaine d’athlètes normands sont qualifiés pour les JO Paris 2024, en compétition valide ou paralympique. Découvrez leur identité.
-
Logan Fontaine, libre nageur
Publié le 06/06/2024 2 min
Membre de la Team Normandie, Logan Fontaine, champion du monde de 5 000 m en eau libre, sera aux JO de Paris. Le nageur aura moins de deux heures pour décrocher un podium sur le 10 km nage libre dans la Seine. Il s’y prépare intensément.
-
Flavie Renouard, l'équilibre à haut niveau
Publié le 06/06/2024 1 min
Membre de la Team Normandie, Flavie Renouard est sur tous les fronts : études, entreprise, préparation au 3 000 m steeple olympique. Le quotidien de l’athlète caennaise est réglé au millième, avec son père pour coach et son imparable sourire pour tout affronter.
-
Amina Zidani, la boxe en coup de foudre
Publié le 06/06/2024 1 min
Membre de la Team Normandie, Amina Zidani a une revanche à prendre. Tokyo lui avait filé entre les gants, mais elle ne lâchera pas son ticket pour Paris. La boxeuse havraise donne absolument tout pour aller au bout de son rêve… en or.
-
JO Paris 2024 : les athlètes normands à suivre
Publié le 20/12/2023 4 min
Une vingtaine d’athlètes de Normandie se préparent intensément pour participer et briller aux JO Paris 2024. Qui sont-ils ? Quelles sont leurs chances ? Comment se préparer au mieux à cet événement hors normes ?
-
Une saison nautique avec Guillaume Pirouelle
Publié le 20/04/2022 4 min
Sélectionné sur le dispositif "Jeune talent normand" organisé par la Région, Guillaume Pirouelle est le nouveau skipper du magnifique Figaro Bénéteau III Région Normandie. A l’issue d'une année d’apprentissage où le navigateur a participé au programme de course 2021 en duo avec Alexis Loison (skipper Région de 2019 à 2021), Guillaume entame sa première saison en solitaire sur le circuit de la classe Figaro Beneteau. Faisons connaissance avec celui qui porte nos couleurs à travers les mers du monde !
-
21 skippers normands sur la Transat Jacques Vabre Normandie Le Havre !
Publié le 19/10/2021 4 min
Ce ne sont pas moins de 21 skippers licenciés dans des clubs de Normandie qui vont prendre le départ de cette 15ème édition de la Transat Jacques Vabre Normandie-Le Havre. 4 sont inscrits dans la Classe IMOCA et 17 dans la Class 40. Découvrez leur parcours, leurs motivations et soutenez-les tout au long de la course !
-
Team Normandie : 6 champions en bleu, blanc, rouge à Tokyo
Publié le 01/07/2021 4 min
Ils sont 6 athlètes de la Team Normandie à avoir décroché le graal : une qualification pour les JO de Tokyo !
Préparation, objectifs, état d’esprit : ils se dévoilent dans une interview sans détour à quelques semaines de la compétition de leur vie.
-
Voyage autour du monde avec Miranda Merron
Publié le 03/11/2020 2 min
Miranda Merron s'apprête à partir à l'aventure ! Après de long mois de préparation, elle va enfin quitter la terre ferme en même temps que 33 bateaux engagés dans la course du Vendée Globe. Objectif : faire le tour du monde en solitaire sans escale, en une centaine de jours, à bord de son voilier Imoca Campagne de France. Imaginez être confiné plus de 3 mois dans un appartement humide de 20m2 qui tangue et prend l'eau, sans aucun voisin à qui parler et aucun produit frais à manger ! Pas de quoi rêver et pourtant Miranda Merron, 51 ans, compte bien profiter de chaque minute de cette folle aventure, unique dans une vie !