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La sauvegarde des Parlers normands

Selon l'Unesco, le normand est une langue « en grand danger ». La Région a décidé de mettre en place une stratégie pour la sauvegarde et la valorisation des « Parlers normands ».

Le Normand, une langue "sérieusement en danger" selon l'UNESCO

Selon la Délégation générale à la langue française et aux langues de France rattachée au Ministère de la Culture, la pluralité linguistique historique de notre territoire présente une richesse et un réel potentiel, encore méconnu et peu exploité, tant au niveau culturel qu'au niveau éducatif, social et économique. Le caractère patrimonial des langues régionales est inscrit dans la Constitution depuis 2008 et le normand fait partie de la liste des Langues de France, qui regroupe toutes les langues envers lesquelles l'Etat se reconnaît une responsabilité.

Le normand est une langue romane, à 80 % issue du latin. Elle s’est mâtinée de quelques termes saxons ou vikings, au gré des apports de l’histoire. Elle a embarqué avec les Normands partis découvrir le continent américain et se retrouve encore aujourd’hui jusqu’au Québec et dans le parler créole réunionnais.

L’histoire retiendra que le Duc de Normandie, devenu Guillaume le Conquérant lorsqu’il fut couronné roi d’Angleterre le 25 décembre 1066, fit du normand la langue du pouvoir et qu’elle devint la plus utilisée dans la littérature anglaise aux XIe et XIIe siècles.

Le normand est parlé aujourd’hui par 30 000 personnes, du Pays de Caux aux îles anglo-normandes. C’est l’une des principales langues d’oïl, classée parmi les langues « sérieusement en danger » par l’UNESCO.

La langue normande se scinde entre différents parlers. Des variations lexicales peuvent apparaitre à très peu de kilomètres de distance. On peut distinguer le cotentinais (Cotentin), le brayon (pays de Bray : Seine Maritime et Oise), le cauchois (pays de Caux), le nord-cauchois, le roumois et l’augeron (dans le pays d’Auge), aujourd’hui quasiment disparu.

Certains mots anglais viennent du normand

Le normand,  langue officielle de la cour d'Angleterre jusqu'au milieu du 14e siècle,  a donné à la langue anglaise une  partie de son vocabulaire : cat, chair, candel, garden, can, fork... ! Il est également à l’origine de la langue jersiaise, dialecte utilisé encore aujourd’hui sur l’ile anglo-normande de Jersey. Plus de 3 550 mots normands à découvrir

La richesse du vocabulaire normand lié à la pluie

"Eune puchie" se situe entre la simple pluie et l'averse.
"Eune ondaée", de même qu' "eune tapaée", c'est une averse passagère. Elle devient "eune harée" si elle se fait plus dense, ou "eune pichée", ou "eune dégelée".
"Eune grêlaée", c'est une averse de grêle.
La pluie peut être la bienvenue quand elle survient après une période de sécheresse : "I tumbe des pyiches dé chent sous"(il tombe des pièces de cent sous).
"Eune chilaée", c'est une sacrée averse ! Mais il y a plus fort : la "lâchie", quand le vent s'en mêle, et surtout "l'afllas d'iâo" ou "l'achanaée", le summum !
S'il pleut abondamment, on dit qu'il "verse", ou qu'il "vase", ou que "cha tumbe à crase", ou encore que "cha décllaque" (Denys Corbet, Guernesey), que "cha délache" ou que "cha déquerque" (Val de saire).
"Acrasaer de plleure", c'est pleuvoir à verse (Maurice Fichet).
"Versaer coume la mé", quand il pleut à verse.

Quelques règles de prononciation

Devant un é ou un i, qu se prononce tch (qui se lit tchi) : eun quoeu se dit un tcheu.
Qu peut aussi se prononcer que (quétoun se lit quéton)
Gu  se prononce gue : guette (regarde) se dit djette.
Ll se prononce y (bllé se dit byé)
H est très guttural (héreng se lit rhéran), à l'instar du j espagnol ou du ch allemand
Le h peut aussi ne pas se prononcer (hivé se lit ivé)
Yin se prononce yi ou i. Quyin se lit tchyi ou tchi.
Men se prononce man devant une consonne ou un h aspiré ; m’n devant une voyelle ou un h muet (de même pour ten, sen).
Les se prononce lé devant une consonne ou un h aspiré ; l’z devant une voyelle ou un h muet (on écrit les éfaunts , on dit l’z éfaunts).
Le e sans accent se ne prononçant pas, belin se dit blin. Toutefois, quand on veut prononcer le e, on le signale par un accent (lé quemin, se lit le qu’min, le quémin se lit l’quemin).
Le é accentué se prononce é (rébelot se dit réblo).
La graphie aun se lit an.
La graphie oun se lit on. 

Ecouter un conte en Normand

Conte de Krystin Vesteralen, disponible aux éditions du Roi Barbu
Traduction réalisée par Alphonse Allain, en parler normand du Cotentin
Texte lu par Rémi Pezeril

Langue normande à l'école

La Région Normandie et la F.A.L.E (Fédération des Associations pour la Langue Normande) ont demandé au Président de la République que la langue normande soient intégrée aux langues régionales reconnues par l’Etat dans le code de l’éducation. A ce jour en effet, dans la proposition de loi sur l’enseignement des langues régionales, qui ouvre la possibilité d’un enseignement immersif en langue régionale dans les écoles publiques et leur enseignement dans le cadre de l’horaire normal des cours, celle-ci n'y figure pas.

Lire le courrier

Une nouvelle stratégie régionale en faveur des Parlers normands

Depuis janvier 2019, la Région a mis en place une stratégie pour la sauvegarde et la valorisation des parlers normands. Le plan d’actions se décline autour de 3 principaux axes.

Axe 1 : sauvegarder les parlers normands

Un groupe de travail pour la réalisation d’un atlas linguistique normand numérique a été mis en place en 2019. Le pilotage a été confié à la Fabrique de patrimoines en Normandie, qui a réuni des représentants de la Région Normandie, de l’université de Caen-Normandie (MRSH) et des archives départementales de la Manche, dépositaire du fonds Brasseur.

Qu’est-ce que l’atlas linguistique normand ?

Le professeur Patrice Brasseur est l’auteur de « L’Atlas linguistique et ethnographique normand » (ALN), comportant les données d’une enquête de terrain qu’il a effectuée de 1970 à 1977 auprès de 697 informateurs, au moyen d’un questionnaire de plus de 2 500 questions touchant à tous les aspects de la vie rurale. L’enquête a porté sur les cinq départements normands ainsi que sur trois îles anglo-normandes (Jersey, Guernesey et Sercq). Les quatre premiers volumes contiennent au total 1 400 cartes et un grand nombre de listes complémentaires. Le cinquième et dernier volume est  paru fin 2019 : il comprend 153 cartes ayant trait à diverses catégories grammaticales. On y trouve également le questionnaire d’enquêtes et un index des signifiés des cinq volumes, indispensable à la consultation de l’ensemble. Cette somme dialectologique de grande ampleur est une grande richesse pour la sauvegarde et la valorisation des parlers normands. L’objectif est de la rendre accessible au grand public en la partageant en ligne, associée à des archives sonores ou visuelles.

Le 3 décembre 2019, la Fabrique de patrimoines en Normandie et les archives départementales de la Manche ont organisé une table ronde intitulée « Autour des parlers normands, les atlas linguistiques régionaux » à Saint-Lô, animée par Stéphane Laîné, dialectologue, afin de faire connaître au grand public ce qu’est un atlas linguistique.

Axe 2 : valoriser et développer les parlers normands

La seconde action qui s’est concrétisée courant 2019 est la constitution du Conseil Scientifique et Culturel (CSC) des parlers normands, pour garantir la qualité scientifique de l’ensemble des travaux menés dans le cadre du plan opérationnel (tant en termes de méthodologie que de contenus) et se consacrer à l’étude, la sauvegarde, la valorisation et la promotion des parlers normands. Il est composé de 16 membres, mêlant universitaires et locuteurs en normand, venant de Normandie, de Lyon, de Toulouse, de Jersey et d’Angleterre.
Par ailleurs, la Région réfléchit à des modalités d’enseignement du normand et étudie la possibilité de proposer un diplôme d’études normandes. Un travail de recensement des glossaires et vocabulaires des instituteurs des années 1880 ainsi que de tous les ouvrages et articles relatifs aux parlers normands est en cours, piloté par la MRSH de l’université de Caen Normandie et la Fédération des Associations pour la Langue normandE (F.A.L.E.). La Région a d’ailleurs signé le 17 juin 2019 une Convention Pluriannuelle d’Objectifs avec cette dernière, pour 2019 / 2021, dans le cadre des deuxième et troisième axes. 

Axe 3 : communiquer auprès du grand public

Créée en 2016, la F.A.L.E. fédère toutes les initiatives se rapportant à la sauvegarde et à la promotion de la langue normande. Elle regroupe plus de 10 associations, dont Magène, la Chouque, l’association des parlers de Normandie (APNOR), les Amis du Donjon, l’Université populaire normande du Coutançais, , l’Université rurale du Cauchois, Le Pucheux, l’Emai, l’association Alfred Rossel et la Fédération des jeux et sports normands.

La Région a décidé de s’appuyer sur cet acteur de référence pour mettre en œuvre une partie de son plan d’actions. 

Parution du Petit Nicolas en Normand

"Le P’tit Colas en normaund" paru chez IMAV éditions, est disponible en librairie depuis le 24 septembre 2020. Il s’adresse aux enfants, à leurs parents ainsi qu’à tous les Normands qui ont à coeur de faire vivre leur patrimoine linguistique.

Dossier de presse 

Accompagnement de la FALE

La Région accompagne la F.A.L.E. à hauteur de 15 000 € par an pour la mise en œuvre des actions suivantes :

  • organisation de temps d’échange conviviaux à travers les Cafés Normands
  • animation d’ateliers de langue normande auprès du grand public
  • promotion des jeux et sports normands
  • Contribution à la promotion et au développement du Rollon

Depuis 2019, la Région Normandie organise la Rencontre régionale des parlers normands ouverte à tous, grand public et universitaire, locuteur ou non locuteur.

Diplôme Universitaire d'Études Normandes (DUEN)

Dans le cadre d’un partenariat entre la Région Normandie et la Maison de la Recherche en Sciences Humaines (MRSH) de l’Université de Caen Normandie, un nouveau Diplôme Universitaire d’Études Normandes a ouvert le 27 février 2023.  Il s’agit de la première formation supérieure du territoire à proposer un enseignement en dialectologie normande. Il comprend 80 heures de formation et concerne trois domaines d’études : dialectologie normande, institution et droit de la Normandie, histoire de la Normandie. Proposé en formation initiale ou continue, le Diplôme Universitaire d'Études Normandes (DUEN) a pour objectif de permettre à toute personne désireuse de mieux connaître cette culture régionale, d’acquérir des connaissances sur la Normandie et ses spécificités dans une approche universitaire scientifique et pluridisciplinaire.

Une formation de sensibilisation à la culture normande a également été proposée à l’ensemble des agents de la collectivité régionale. D’une durée totale de 35 heures, elle comprend une découverte des parlers de Normandie, de l’histoire des institutions normandes à l’époque ducale, une sensibilisation au droit normand et au droit coutumier et une connaissance des paysages ruraux et habitats traditionnels.

Les premiers diplômes et attestations de formation aux "Parlers Normands" ont été remis en juin 2023 à 32 étudiants dont des agents de la Région Normandie.

Mise en place d’une formation à la culture normande pour les agents de la Région Normandie

En lien avec la mise en place du Diplôme Universitaire d'Études Normandes (DUEN), et dans le cadre de son plan de formation, la Région mettra en place une sensibilisation à la culture normande pour ses agents des sites administratifs et des lycées. 

Deux sessions expérimentales de formation, d’une durée 35 heures (soit 5 jours), s’appuyant sur les Unités d’Enseignement (UE) du DU – Etudes Normandes, leur seront ainsi proposées dès 2023, sur la base de candidature et dans le respect des droits à formation, permettant de former une trentaine d’agents sur l’année.

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