Aller au contenu principal
Retour à la page d’accueil

Nouvelles consommations : en Normandie, ils ont tout compris !

Barnabé l'épicier (crédit : Julien Ysebaert)

clock Publié le 18 février 2021

Les professionnels normands (qui peuvent exercer) se démènent pour répondre aux nouvelles attentes des consommateurs. Click and collect, drive, nouvelles enseignes, produits innovants : rien ne les arrête pour sortir de l’ombre des géants de la grande distribution et du e-commerce. Leur credo : bons sens économique, écologique et engagement social. À retrouver sur aurendezvousdesnormands.fr

Des solutions pour consommer autrement

Contraints de se recentrer sur leurs besoins "essentiels" depuis le printemps 2020, les Normands n’ont pas échappé à la remise en question de leurs modes de consommation. Le phénomène a été mesuré à l’échelle nationale (cf article de presse) : une majorité de Français souhaitaient encore consommer au ralenti et avec frugalité en juin dernier, à la sortie du premier confinement, ils ont également affirmé un regain d’intérêt pour le marché d’occasion et surtout ils ont exprimé un attachement croissant à un système de valeurs placé sous le signe du circuit court et de l’économie locale. Une rupture avec la consommation de masse.

« Il y a une dynamique en France, une vraie prise de conscience citoyenne. Sur le rapport à l’autonomie alimentaire, il y aura un avant et un après. »

Benoît Sébaut, chargé de développement au sein du collectif Normandie Equitable

Un mouvement qu’il mesure localement. En juin et juillet derniers, Normandie Equitable, qui regroupe 50 entreprises engagées dans la "consommation responsable", a organisé les Super’Marchés au Wip, sur le plateau de Caen-Colombelles. Vingt-cinq producteurs et artisans sont venus présentés et vendre leurs produits. "Plus de 600 personnes se sont déplacées malgré les contraintes sanitaires". 

L’engouement est bien réel, il n’est d’ailleurs pas que citadin. Un peu partout sur le territoire normand, las de mettre tous leurs sous dans les mêmes paniers (ceux des hypermarchés, des grandes enseignes et des géants du e-commerce), les consommateurs ont cherché et trouvé une bouffée d’air, auprès des professionnels de leurs localités. Et c’est ainsi qu’ils ont découvert un maillage de structures commerciales, de petites à moyennes, prêtes à donner du sens à leurs achats. Des professionnels qui ne cessent d’innover pour toucher plus largement que les cercles des premiers consommateurs convaincus. Pour dépasser les rangs des clients qui connaissent depuis longtemps les paniers hebdomadaires des AMAP (Associations pour le maintien d’une agriculture paysanne) et la vente directe à la ferme. 

C’est pour faciliter la rencontre entre cette offre qui gagne à être connue et cette demande de made in Normandie, que la Région développe au fil des mois un site qui référence tous ces professionnels. Elle y présente un large panel de services et de produits, car les circuits courts et le "mieux consommer" vont au-delà des seuls produits alimentaires. Pour s’en rendre compte, il suffit d’aller les chercher !

Au rendez-vous des Normands

Créée en avril 2020 pour donner de la visibilité aux producteurs normands durant le confinement, la plateforme Au rendez-vous des Normands évolue. Outre les producteurs, elle intègrera en mars l’ensemble des professionnels (commerçants, artisans, constructeurs, fournisseurs, réparateurs…) s’inscrivant dans une démarche éthique, travaillant en circuit court et/ou utilisant la monnaie normande RolloN. Une Market place est également en cours de création pour leur proposer de commercialiser leur offre en ligne d’ici quelques semaines. Un outil incontournable pour tous ceux qui ont envie de consommer éco-responsable, régional et solidaire ! 

N°1/ Ils soignent leur vitrine digitale

Dans le contexte de pandémie de COVID 19, les mesures sanitaires (distanciations physiques, fermetures partielles ou totales des commerces, couvre-feu…) ont naturellement accentué la dimension stratégique du e-commerce. Et les entrepreneurs normands ont à cœur de démontrer qu’il n’y a pas que le géant Amazon pour faire ses achats en ligne !

Cake Lucky

"Développer le site cakelucky.fr était crucial. Je n’aurais pas pu le faire sans l’aide de la Région. C’est indispensable pour proposer la vente en ligne, en complément de nos points de vente. C’est aussi un gage de crédibilité lorsque vous allez à la rencontre de distributeurs" explique Sandrine Treisser-Grente qui a lancé sa société en mars 2020, en plein confinement.  Les consommateurs peuvent découvrir sur son site ce qui fait l’identité de son entreprise, ses valeurs, ses engagements… Autant d’aspects déterminants pour mettre en confiance le consommateur avant l’acte d’achat. 

« Cake lucky ? C’est un clin d’œil à Daft Punk et son tube "Get Lucky", j’aime travailler dans la bonne humeur. »

Sandrine Treisser-Grente, entrepreneure à Bayeux

Cake Lucky, des douceurs solidaires et responsables

"Nos financiers et confitures sont éco-responsables, sans additifs, ni conservateurs et tous nos emballages également (sachets en cellulose de bois, cartons biodégradables)". La démarche de l’entrepeneure du Bessin est également sociale : son atelier de fabrication est au sein de l’ESAT Les Compagnons, rue de la résistance à Bayeux. "Ce qui m’intéresse c’est de valoriser ce que chacun peut faire". Là-bas, elle travaille quotidiennement avec 15 adultes en situation de handicap qui fabriquent avec elle sa gamme de produits d’épicerie fine.


Réussir son projet d’entreprise, c’est aussi se démarquer. "Cake lucky c’est de l’imagination et du travail. Nous voulions un produit innovant à partir de matières premières normandes. Nous proposons des financiers de 10 saveurs différentes et des confitures fruits et légumes (patate douce, ananas par exemple). Nous sommes les seuls". Une démarche qui devrait bientôt recevoir le label "Saveurs de Normandie".
 

Le Cellier des Bien-Vivants au Hangar Zéro

L’originalité c’est également le pari d’Evard Retour-Ripoll, chef d’entreprise à Saint-Martin du Bec (76). Son concept : créer une boutique de vins et de produits normands dans un tiers-lieux en cours d’installation dans la périphérie havraise : le Hangar zéro.

« Mes vins n’ont pas de code barre sur leurs étiquettes, on ne les trouve pas en grande surface. »

Evard Retout-Ripoll, entrepreneur à Saint-Martin du Bec

Cet ancien lieu de stockage sur le quai de la Seine est en cours d’aménagement, son ouverture est programmée en avril. Il réunit de nombreux acteurs locaux de la transition écologique, organisés au sein d’une Société Coopérative d’Intérêt Collectif (SCIC). Evard Retout-Ripoll y trouve un aboutissement logique. Les dégustations à domicile qu’il organisait depuis 2015 ont été stoppées avec l’épidémie de COVID, il ne lui restait plus que les marchés. Mais après six années de vente nomade, Evard a décidé de poser enfin ses caisses de vin.

Sur le web d’abord, en recevant à son tour un coup de pouce de l’AD Normandie pour créer un site internet "moderne, bien référencé et proposant un vrai catalogue en ligne". Un portail où il peut mettre en avant sa démarche, orientée vers la qualité et la rencontre : "Je prêche pour une consommation intelligente et saine. Je sais comment travaillent mes producteurs, je ne vends que des vins qu’on ne trouve pas en grande surface". En attendant l’ouverture de sa boutique, Le Cellier des Bien-Vivants assure des livraisons dans le Pays de Caux.

Impulsion Transition numérique 

Vous êtes une entreprise de moins de 10 salariés et vous souhaitez accroître votre chiffre d’affaires ou votre visibilité grâce au numérique ? Créer un nouveau site internet, optimiser la gestion de vos stocks, développer une activité de vente à distance, offrir de nouveaux services à vos clients ? L’aide Impulsion numérique vous permet de faire appel à un spécialiste qui vous aidera à analyser vos besoins et à trouver les solutions les mieux adaptées.
 

N°2/ Ils s’adaptent aux besoins des consommateurs : le drive

Autres modes de consommation qui ont pris du volume avec les contraintes sanitaires liées au COVID : le click and collect et le drive. Pratiques, rapides, ils conviennent particulièrement aux actifs, mais aussi aux festifs !

La Calvadosienne

"Il n’y a pas d’heure. Il y a des ventes en soirée, au petit matin à 5h, les dimanche après-midi et le soir pour un apéritif de fin de week-end". Stéphane Typhaigne, directeur de La Calvadosienne, fait approvisionner 5 distributeurs automatiques d’huîtres normandes de Meuvaine (Asnelles, 14). Depuis 2019, on les trouve sur les bords de route ou les centres-villes du Pays d’Auge, de Caen et du Bessin. Les huîtres sont proposées à la vente maximum 2,5 jours avant d’être remplacées. Elles sont conservées dans les meilleures conditions qui soient : "froid ventilé et température constante de 6 à 7°C. En termes de qualité, c’est le top" affirme le gérant. 

Des huîtres de qualité en distributeur

Chaque semaine, 20 à 30 bourriches (de plusieurs tailles) sont vendues par distributeur. Un volume qui ne représente qu’une faible part du chiffre d’affaires de la Calvadosienne qui s’appuie davantage sur la grande distribution, les restaurateurs (en temp normal) et les mareyeurs. Mais ce mode de distribution "a pris de l’ampleur avec le COVID" et s’affirme comme une brique essentielle de la stratégie en circuits courts de l’ostréiculteur : "En plus de notre magasin sur site, juste à côté de nos 5 hectares de parc à huître et de notre présence sur les marchés (Caen, Rouen, Pont-l’Evêque), les distributeurs nous permettent de toucher d’autres territoires. Ils nous font connaître.

Beaucoup de gens ne savent pas que des huîtres sont produites tout près de Caen" appuie Stéphane Tiphaigne. Alors même que cet établissement a 30 ans d’existence et qu’il a reçu la médaille d’or lors du Salon international de l’Agriculture 2020 ! Son engagement est aussi social : il a été créé par l’association l’ACSEA en 1991. Il fait travailler 25 personnes en insertion qui assurent la production et la distribution de 350 tonnes d’huîtres par an. 

Epi'boujou 

L’ancienne salle d’arts martiaux de Montivilliers, à quelques kilomètres au nord-est du Havre, a récemment repris du service. Mais le combat qui se déroule désormais dans ce vaste hangar, à l’écart de la ville, n’est plus le même : c’est celui du “mieux consommer” et de la lutte contre les déchets ou le gaspillage. C’est dans cette aventure collective, baptisée Epi’Boujou, que se sont lancés à l’été 2020 quatre trentenaires tournés vers les modes de consommation de demain.

L’histoire a commencé deux ans plus tôt, lorsque ces natifs de Seine-Maritime se retrouvent autour de valeurs communes et de l’envie d’œuvrer pour leur territoire. Ils étudient leur modèle économique et se répartissent les rôles.

La vente en vrac

Première activité : la vente en vrac, menée par Céline, qui fait d’abord les marchés avec une remorque en vendant des produits d’hygiène, et élargit peu à peu son offre pour répondre aux demandes de clients de plus en plus fidèles.

Le drive éco-responsable

En octobre 2020 naît le drive éco-responsable, malgré un contexte rendu difficile par la crise du coronavirus. Il abrite dans ces locaux de la périphérie havraise une offre complète de produits alimentaires. Cette partie, c’est William qui s’en charge : “pour toutes les communes qui entourent Le Havre, on offre une solution de proximité afin d’éviter de se rendre en centre-ville pour faire ses courses. Notre objectif, c’est d’être capables de répondre à toutes les demandes en proposant des produits locaux en grande partie. Quand ce n’est pas possible, comme pour le riz ou les pâtes, on se tourne vers des fournisseurs de bio ou d’éthique.” Le bio, ici, n’est pas systématique : “de nombreux producteurs pratiquent l’agriculture raisonnée et font des produits sains, sans pour autant remplir les critères de bio, dont la certification peut coûter cher.” Chaque semaine, William enregistre 40 à 50 commandes au drive. Et espère bien doubler ce nombre d’ici la fin de l’année.

la recyclerie et les animations

Parallèlement, Epi’Boujou met en vente du mobilier de réemploi, que Thomas fabrique à partir de bois de palette ou de matériaux en fin de (première !) vie. Enfin, Marjorie travaille de son côté aux animations et à la sensibilisation des publics à ces sujets, et à ces valeurs de partage et de solidarité. Parmi les chantiers, la mise en place de commandes groupées à prix coûtant pour des quartiers défavorisés.

Et le COVID, dans tout ça ? “On a eu moins de recettes que prévu, oui, mais moins de dépenses aussi”, explique William : “on est obligés d’innover, de trouver des solutions. Peut-être la livraison, une façon d’appuyer notre volet solidaire ?” Epi’Boujou aimerait bientôt proposer aux entreprises des paniers de producteurs pour leurs salariés. “Avec la situation actuelle de couvre-feu, cela faciliterait largement les courses des employés...” Epi’Boujou, toujours en mouvement, n’a plus qu’à se faire connaître pour pérenniser les emplois des 4 associés. 

N°3/ Ils se regroupent pour être plus forts

Et qu’en est-il dans les villages et les campagnes de Normandie ? Pour faciliter les achats des consommateurs et leur éviter de longs déplacements, qui ne satisferaient qu’une trop faible partie de leurs besoins en produits, la tendance est à l’union des forces. Un moyen efficace pour faire de la vente directe en répartissant les charges de fonctionnement d’un magasin et pour élargir la gamme des produits proposés aux clients. 

La Halte Paysanne

A Saint-Georges-des-Groseillers (61), ce sont 5 agriculteurs qui ont monté leur point de vente collectif voici 3 ans. Ils se sont installés sous un vaste hangar de 200m2 de la zone commerciale. Aujourd’hui, leur Halte paysanne a atteint une phase de stabilité. “Au début, nous comptions une trentaine de producteurs. Les gens venaient pour les produits de base et allaient trouver le reste ailleurs. Désormais, on est un peu comme une ferme géante avec une centaine de producteurs qui fixent eux-mêmes les prix qu’ils veulent afficher. Et ça fonctionne !”, se réjouit Joseph, co-gérant mais aussi maraîcher et éleveur de poulets.

« Ici, chacun de nous connaît les produits présents sur nos étals et tous les producteurs qui les vendent. »

Joseph, co-gérant de la Halte Paysanne

En 3 ans, le chiffre d’affaires a augmenté de 60%, tout comme la clientèle, principalement séduite par le goût des produits et par cette facilité d’échange avec les responsables sur place.

Le pari n’était pas gagné d’avance, dans ce secteur nord de la ville de Flers où beaucoup déconseillaient de s’installer. Mais la philosophie du lieu a convaincu, et son accès facile (ses nombreuses places de stationnement) l’ont vite transformé en étape incontournable sur les trajets domicile-travail. Les meilleurs jours, pas loin d’une centaine de clients se succèdent en boutique, certains d’entre eux parcourent jusqu’à une quinzaine de kilomètres pour venir s’y approvisionner.

Barnabé l’épicier 

Discrète enseigne sur la place centrale du village de Longny-au-Perche, dans l’Orne, la petite boutique de Barnabé l’Épicier – 70 m2 seulement ! - ressemble à n’importe quelle échoppe endormie au milieu de l’hiver. C’est en poussant sa porte en verre qu’on mesure combien cette épicerie se distingue de ses semblables. Dès l’entrée, c’est dans de longs tubes transparents qu’on se sert des pâtes, du riz, des fruits à coques ou des biscuits. “Le vrac, c’est la mode à Paris, et pour les millenials ! Mais ici, dans la campagne du Perche, ça n’est pas encore passé dans les mœurs.” Le long des murs : les productions de 50 paysans alentour,  fruits, légumes, bières locales, épicerie bio, cosmétiques… pas loin de 1 000 références !

Une épicerie créatrice de liens sociaux

Cela fera 6 ans en avril qu’Olivier Peyroles a donné vie à son idée : créer une épicerie associative pour mettre en avant producteurs locaux et produits bio. Un moyen aussi de faire face à la baisse continue du nombre d’habitants et à ses effets sur toute l’économie locale. Il imagine aussi apporter du lien social. “Avec les bénévoles et les deux salariés de l’association, nous contribuons à notre niveau, modestement, au développement de l’économie locale.”

La crise liée au coronavirus aurait pu anéantir le lieu, bien au contraire. “Beaucoup de nouveaux clients sont arrivés, qui trouvaient davantage de temps pour faire leurs courses, pour cuisiner… Et une fois qu’ils ont découvert, ils ont pris de nouvelles habitudes. Pendant les confinements, beaucoup de Parisiens ont aussi afflué“ se réjouit l’initiateur de Barnabé l’Épicier, lui-même Parisien d’origine.

Ancien financier, le retraité est devenu entrepreneur bénévole : une seconde vie : “ Quand je travaillais sur le modèle économique de l’épicerie, l’essaimage était une utopie. Et pourtant, il se réalise !”. Barnabé l’épicier a bénéficié de l’aide Emergence ESS de la Région Normandie. En mai prochain, un deuxième Barnabé l’Épicier ouvrira dans le village voisin de Tourouvre-au-Perche. Avec même un petit coin de rencontres pour boire un café ou lire un livre.

N°4/ Ils vont au bout de leur démarche : l’économie circulaire

Rien ne se perd, tout se transforme !

Et si on arrêtait de jeter les objets dès qu’ils ne nous plaisent plus ou montrent des signes de fatigue ? L'économie circulaire propose de repenser nos modes de production et de consommation pour limiter le gaspillage des ressources et la production des déchets. Il s'agit de passer d'une société du tout jetable à un modèle économique plus vertueux et responsable. Fini l’époque du acheter-consommer-jeter, vive l’ère du réparer-transformer-réutiliser !
 

Dialogue citoyen

Reportages "Tous Normands"

logo